Pour de nombreux praticiens, choisir entre le régime dit des BNC (bénéfices non commerciaux) et de l’IS (impôt sur les sociétés) demeure un véritable dilemme.

Mais le Docteur Durand n’en peut décidemment plus de devoir faire face à des régularisations intempestives de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu en N+1 sur ses revenus de l’exercice N. L’Urssaf lui explique en effet, qu’il doit payer des acomptes provisionnels de cotisations sur la base de son BNC N-2 et qu’il sera régularisé en N par rapport à ses résultats de N-1. Comme d’habitude, tout est très simple en France !

Par ailleurs, comme tout un chacun, il a compris qu’avec le prélèvement à la source, il paierait son impôt sur le revenu au fil de l’eau, en temps réel et qu’il ne subirait ainsi plus d’ajustements au niveau de son impôt sur le revenu. En pratique, il n’en est rien : le prélèvement à la source ne « s’applique pas » aux travailleurs indépendants. Le Docteur Durand continuera à régler ses acomptes d’impôt sur le revenu en 2019 par rapport à ses revenus de 2017. Puis une fois que ses revenus 2018 seront connus de l’administration fiscale, après déclaration et traitement en juin 2019, un réajustement sera opéré par le Fisc sur le second semestre.

Si le Docteur Durand exerçait au sein d’une SELARL, avec option à l’impôt sur les sociétés, il pourrait lisser sa fiscalité et ses cotisations sociales. En effet, la fixation d’une rémunération de gérance, le « salaire » du praticien, lui permettrait de pouvoir décider en amont de son niveau d’imposition aux cotisations sociales et à l’impôt sur le revenu. Rémunération qu’il est possible de faire varier a posteriori, après la clôture de l’exercice, via la comptabilisation d’un complément de gérance.

Dans le régime dit des « bénéfices non commerciaux » (BNC), la base de taxation repose sur la différence entre les revenus encaissés et les charges décaissées. Il n’y a donc pas moyen de déconnecter sa fiscalité personnelle de sa fiscalité professionnelle car ce régime repose sur la transparence fiscale. En résumé, mon BNC constitue ma base d’imposition.

A contrario, le régime de l’impôt sur les sociétés est un régime qualifié d’opaque : une dissociation est opérée entre la fiscalité professionnelle (du cabinet) et la fiscalité personnelle (du praticien). La société paie son propre impôt, l’impôt sur les sociétés, sur la base du résultat fiscal dégagé, après déduction de la rémunération du praticien et de ses charges sociales.

 

Comment est imposé le résultat fiscal d’une société à l’IS?

Le résultat est taxé au taux de 15% jusqu’à 38 120 € (taux réduit) puis à 28% au-delà (taux normal).

Exemple : la société génère un résultat courant avant impôt société de 45 000 € ; le montant de l’IS est de : (45 000-38 120)*28%+38120*15% = 7 644 €

Nous rappelons que jusqu’au 31 décembre 2017, le taux normal s’élevait à 33.33%. L’objectif est de ramener ce taux normal d’imposition de 28% à 25% car la France est en compétition avec certains états du monde où le taux d’IS est bien plus bas. A titre d’exemple, le taux de base est de 22% au Royaume Uni, 23% au Portugal, 25% en Autriche, 22% au Danemark, 21% aux Etats Unis,…

Une fois l’impôt sur les sociétés acquitté, la société soumise à l’IS, dégage un résultat net, qui peut être distribué sous la forme de dividende, imposé actuellement selon la flat tax de 12.80%. L’impôt est payé par la société, sur sa trésorerie propre. Quant aux cotisations sociales Urssaf et Carcdsf, elles sont dues sur la quote-part du dividende qui excède 10% du capital social, d’où l’intérêt au fil de l’eau de pouvoir augmenter ce dernier pour bénéficier d’un effet de levier social.

Néanmoins, pour que le Docteur Durand puisse se verser des dividendes, faut-il encore qu’il dégage un résultat net suffisant. Cela signifie donc que dans un cabinet qui dégage un chiffre d’affaires de l’Ordre de 250 000 euros avec une rentabilité standard de 75 000 €, la rémunération du praticien absorbera la quasi intégralité du résultat. La simplicité du BNC devra être privilégiée, à moins que le praticien soit en phase de croissance et recherche avant tout dans le régime IS le confort et la facilité de la gestion de sa trésorerie.

Pour le Docteur Carrié, le changement de régime fiscal, passage du BNC vers l’IS, via la création d’une SELARL, est l’occasion :

  • De pouvoir se refinancer à court terme dans un cadre fiscal et social avantageux. Ayant acquis sa patientèle 72 000 euros en 2005, la faible plus-value de cession dégagée sur l’opération ne sera taxée qu’à hauteur de 30% (dont 12.80% d’impôt sur le revenu et 17.20% de prélèvements sociaux) dans le cadre de l’opération de « vente à soi même » opérée. Exemple : pour un prix de vente de 90 000 €, la plus-value sera de : 90 000 – 72 000 = 18 000 euros et l’imposition totale de 18 000 * 30% = 5 400 €
  • De potentiellement pouvoir associer un ou plusieurs jeunes praticiens, afin de développer un cabinet de groupe, sans que ces derniers aient à mettre la main à la poche. En effet, la société à l’IS étant fortement endettée, la valeur des parts est faible au démarrage ;

Faut il changer de régime fiscal en fin de carrière ?

Tout dépend de l’horizon du capitaine et des perspectives de transmission du cabinet. A trois ans de la quille, après toute une carrière sous le régime BNC, il n’y a aucun intérêt à réaliser la mutation ! Un changement de régime fiscal s’anticipe et se prépare : n’attendez pas 65 ans pour y songer !

Lors d’une création d’activité, le régime BNC est souvent privilégié à juste titre à cause de sa simplicité. Dans certaines zones à fiscalité privilégiée (ZRR, ZFU), il est incontournable de part les exonérations fiscales dont on peut bénéficier.

Par contre, quant il s’agit de racheter un cabinet, l’intérêt du régime de l’IS est réel. Le capital de l’emprunt souscrit pour racheter une patientèle et des parts de SCM n’étant pas déductible, le régime BNC s’avère être un handicap dans la mesure où le praticien se retrouve taxé sur des revenus qu’il n’a pas. Tout dépend bien évidemment des montants enjeux : pour une patientèle de 3 000 € et des parts de SCM de 500 €, pas besoin de monter une usine à gaz !

Avant de changer de régime fiscal, il est indispensable de réaliser des simulations sociales et fiscales à court, moyen et long terme, afin d’en mesurer toutes les conséquences. Ce type de décision ne se prend pas à la légère.

Enfin, comme l’évolution d’un régime fiscal est souvent corrélée à des transformations juridiques, les délais de mise en œuvre sont susceptibles de prendre du temps.

Soyez également vigilant sur les deadlines en vigueur. Par exemple, pour qu’une SCP, une SELARL opte à l’IS, l’option doit être réalisée dans les 3 premiers mois de l’exercice.

Date

26 juin 2019

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Revue de presse